Une
nouvelle étape est franchie: la Commission des affaires
juridiques du Conseil national a approuvé le projet
de "loi fédérale sur le partenariat enregistré
pour les couples de même sexe" présenté
par le gouvernement.
La
Suisse est cette fois moins en retard que lorsqu'il s'est
agi de reconnaître les droits politiques aux femmes.
Mais ici, pour le meilleur et pour le pire, la décision
n'appartient ni à un tribunal (comme récemment
au Canada) ni à une classe politique éclairée,
mais au corps électoral se prononçant lors
d'une votation. C'est un surmoi toujours présent,
particulièrement nocif à l'épanouissement,
si naturel à coup d'alternance dans les démocraties
parlementaires, de celles et ceux qui vivent de politique...
Aujourd'hui, le soutien des élites est acquis (hommage
soit rendu à la conseillère fédérale
Ruth Metzler, démocrate-chrétienne qui brave
les foudres vaticanes!), la majorité dans l'opinion
publique paraît solide: quel progrès le bon
sens a-t-il fait en peu d'années pour reconnaître
que gays et lesbiennes n'y peuvent davantage et ne sont
pas plus contagieux que les hétéros, qu'ils
et elles sont des êtres comme les autres et ont autant
droit à la poursuite du bonheur, y compris dans le
couple si ça leur chante!
La
question de l'adoption
L'adoption
par des gays ou des lesbiennes, seuls ou en couple, reste
un sujet chaud: le Danemark l'avait expressément
exclue dans sa loi de 1989 qui instituait, pour la première
fois, un partenariat pour les couples de même sexe.
Les anglo-saxons sont plus pragmatiques, qui la connaissent
de cas en cas depuis longtemps (la Grande-Bretagne, qui
ne fait rien comme tout le monde, a légiféré
pour reconnaître l'adoption par un couple de même
sexe avant même d'avoir un statut de partenariat -
il est en cours d'approbation au parlement). Pour la Suisse,
la commission du Conseil national a maintenu par 12 voix
contre 9 l'interdiction stipulée dans le projet de
loi. En séance plénière, deux propositions
de minorité seront présentées: permettre
l'adoption seulement dans des situations spécifiques
(enfant de la ou du partenaire, p.ex.), ou ne rien stipuler
à ce propos et laisser la décision, de cas
en cas, aux autorités compétentes; après
tout, l'adoption n'est pas le droit d'adultes à adopter
un enfant, mais le droit d'enfants à se voir attribuer
un ou des parents adoptifs lorsque les parents naturels
font défaut.
Peut-être
bien qu'un débat de société sur l'adoption
par des couples de même sexe serait utile. Et peut-être
bien qu'il ne suffirait même pas à faire dérailler
la loi en votation populaire. Mais on peut aussi ne pas
vouloir prendre le risque, et préférer la
politique des "petits pas", à la suisse.
Que la minorité parlementaire soit la plus élevée
possible, bien sûr. Que les organisations de gays
et de lesbiennes revendiquent, c'est dans leur rôle
(mais attention, pas au point de laisser penser qu'un échec
sur ce point rendrait la loi moins digne de soutien!). Le
maintien de l'interdiction dans la loi, s'il est choquant
sur le plan du principe, a l'avantage de limiter le débat
au partenariat lui-même. Elle n'empêchera pas
de revenir sur la question d'ici quelques années,
spécifiquement, à l'occasion d'une révision
générale des dispositions sur l'adoption par
exemple.
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