Le 11 octobre est la journée
internationale du "coming out": une occasion politico-médiatique de promouvoir
la reconnaissance et l'acceptation de leur homosexualité par celles et ceux qui sont
encore "dans le placard". Cette année, pour la première fois, dans toute la
Suisse. Celles et ceux qui utilisent les sites
Internet proposant l'envoi de cartes virtuelles le savent: les Américains sont friands de
ces Journées dédiées à telle cause ou corporation, qu'elles soient décrétées par le
président ou les fleuristes... La Journée du coming out (littéralement: "coming
out of the closet", "sortir du placard" pour un gay ou une lesbienne)
existe depuis le 11 octobre 1988, une année après une marche qui a rassemblé un million
de manifestant-e-s à Washington. Célébrée en Suisse depuis 1991, elle bénéficie
d'une audience certaine du moins dans les médias suisses alémaniques, la presse
romande étant traditionnellement plus timide. Par rapport à la manifestation plus
revendicative et haute en couleur de la Gay Pride à fin juin/début juillet, c'est une
occasion de faire prendre conscience d'une réalité moins flamboyante: l'importance de se
reconnaître et de s'accepter comme on est, comme membre d'une minorité. Une information
ou des actions qui concernent aussi bien les jeunes que les parents, les enseignants et la
population en général.
Levons d'emblée une ambiguïté néfaste, parfois
défendue avec les meilleures intentions du monde: non, l'orientation sexuelle ne relève
pas de la plus stricte intimité, comme une caractéristique privée qui ne regarde
personne. Sans vraiment s'afficher, elle est souvent évidente comme le sexe ou la couleur
de la peau: c'est ainsi que l'hétérosexualité s'impose triomphalement partout, dans les
médias et la vie quotidienne, sans qu'on s'en aperçoive; elle va de soi. D'où un
inévitable sentiment de malaise, de recherche de repères, quand en grandissant on se
rend compte que l'on est "différent-e". C'est un processus difficile et
douloureux: une étude du Centre hospitalier universitaire vaudois sur mandat de l'Office
fédéral de la santé publique a montré qu'un quart des adolescents gays commet une
tentative de suicide.
Bien sûr les mentalités ont évolué: les médias ou la
publicité font aujourd'hui une large place à l'homosexualité. Mais l'adolescence est
aussi un âge où l'on ne rêve que de se fondre dans la masse, et non de se distinguer.
Et l'homophobie, verbale ou physique (elle peut aller jusqu'au meurtre), reste une
réalité dont une part relève probablement de craintes émotionnelles: en parler est
aussi le meilleur moyen d'aider à les dominer.
Cette année, en Suisse, à l'initiative des
organisations de gays, de lesbiennes et de leurs parents et ami-e-s, une action est plus
particulièrement destinée à faire parler d'homosexualité à l'école. Elle adapte le
combat féministe d'il y a 25 ans qui dénonçait l'univers de référence exclusivement
patriarcal et masculin du matériel scolaire en relevant qu'aujourd'hui l'école manque à
sa mission en faisant l'impasse sur la réalité de l'homosexualité (alors qu'elle joue
par exemple activement son rôle d'intégration des étrangers et de lutte contre le
racisme). Concrètement, les gays, lesbiennes et bisexuel-le-s de tout le pays sont
invité-e-s à adresser personnellement une lettre circulaire à leur ancienne école
"pour que cesse l'homophobie en milieu scolaire".
Adresses utiles:
Journée nationale du coming out CH, case postale 7679,
8023 Zurich
Pink Cross, antenne gaie suisse
Organisation suisse des lesbiennes
Lambda éducation, Genève
Coming out et Outing
Dans un monde idéal, le coming out ne serait
qu'une étape à franchir aux alentours de l'adolescence. La réalité est moins rose est
c'est souvent plus tard que certain-e-s arrivent à s'accepter, ou à se libérer de
l'illusion d'avoir à cacher leur orientation sexuelle à leur famille, leurs amis, leurs
collègues de travail (quand il est impossible d'ignorer l'hétérosexualité de
quiconque).
L'expression outing désigne, elle, la
révélation par des tiers de l'homosexualité ou de la bisexualité d'une personnalité
qui cache cette orientation, tout en l'acceptant et en la vivant (dernière
"victime" en date: Jörg Haider, le leader d'extrême droite autrichien). Acte
proprement politique (à ne pas confondre avec la manifestation d'homophobie qui part de
l'idée que la révéler, c'est flétrir la personne qui en est l'objet) popularisé
notamment par le mouvement Act Up, il s'agit de refuser l'hypocrisie, voire d'en appeler
à la responsabilité de celles et ceux qui, précisément parce qu'elles et ils sont des
personnalités qui n'ont rien à craindre, ont un devoir moral de ne pas se faire passer
pour hétérosexuel-le-s.
"A visage découvert"
Sous ce titre, 30 jeunes gays et lesbiennes de Suisse
Romande racontent leur histoire. Avec élégance, talent et philosophie, mais surtout avec
une honnêteté et un courage qui forcent le respect. Des récits de vie qui rappellent
certaines valeurs essentielles et qui soulignent quau-delà des différences, nous
avons tous besoin damour et de liberté. Préface de Ruth Dreifuss. Editions
Slatkine. |