Ainsi
donc Pierre-Alain Buffat est gay! C'est ce qu'une lecture
attentive du compte-rendu d'audience du Temps (14.7)
permet de comprendre. Sans vouloir faire de cette caractéristique
personnelle l'explication des fautes professionnelles de l'intéressé,
bien sûr, ni en sens inverse ériger l'ex-chef du service des
finances du canton de Vaud en victime emblématique de l'homophobie,
cela me paraît mériter un commentaire.
Parmi les conseillers d'Etat, les collègues ou les subordonnés qui l'ont
côtoyés, qui le savait? Il semble bien que, parmi les différentes attitudes
possibles (de la fuite dans le mariage à l'affirmation de soi), Buffat ait choisi la
cloison étanche entre la personne publique et la personne privée. A quel prix, et quel
hétéro l'accepterait? C'est dès l'enfance que les gays et les lesbiennes
apprennent cette maîtrise de soi de tous les instants qui n'est que dissimulation
contrainte: pour nous par de commentaire grivois, pas de regard qui s'attarde ou de
sourire engageant, sauf en cercle strictement contrôlé. Le refus de son
homosexualité est la première cause de suicide chez les adolescents. Une autre
réaction typique est ce surinvestissement professionnel, ce besoin obsessionnel de
prouver aux autres et à soi-même que l'on est le meilleur.
Souvent des hétéros (même ouverts) défendent l'idée
qu'ils n'ont pas à savoir. C'est confondre une indifférence de bon aloi (le
respect du droit à la différence) avec un aveuglement coupable: l'invisibilité est la
première excuse de l'ignorance qui conduit au rejet. Ces hétéros, même
célibataires, sont par ailleurs les derniers à observer pareille discrétion pour
eux-mêmes. Sans revendiquer le moins du monde l'étalage forcé des gâteries
favorites de chacune et chacun, plus d'attention réelle à autrui ne ferait pas de mal,
en commençant systématiquement par ne pas assumer que tout le monde est hétéro.
Mais
c'est bien sûr d'abord aux gays et aux lesbiennes (tout
particulièrement ceux que leur position socio-professionnelle
met à l'abri de tout inconvénient réel) de trouver l'estime
d'eux-mêmes qui doit leur permettre d'être sereinement visibles
comme personnes -- et du fait que cela ne tient pas
à la couleur de leur peau cela passe nécessairement par
la parole. Par respect de soi et d'autrui, et pour
ne pas avoir à craquer plus tard.
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